Témoignage de Christine Ratzel,
maire adjointe d’Aubervilliers en charge de la coopération
décentralisée, en mission dans la Bande de Gaza avec Cités
Unies France, du 1er au 8 mars 2009
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Un groupe d’élus français s’est rendu à l’appel du Cités Unis France en Palestine et
particulièrement à GAZA du 1er au 8 mars 2009 :
Cette mission était composée des élus suivants:
-
Charles JOSSELIN, Président de CUF (Cités Unies France) et ancien ministre
-
Loïc CAURET, maire de Lamballe
-
Stéphane PEU, maire adjoint de Saint Denis, vice président de Plaine Commune
-
Rose GOMIS, maire adjointe de Saint Denis, vice président de Plaine Commune
-
Jean Philippe MAGNEN, maire adjoint de Nantes et conseiller délégué de la communauté d’agglomération
-
Alain DESMARET, premier vice président du conseil général du val de marne
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Alain AUDOUBERT, Maire de Vitry sur Seine
-
Patricia CEREIJO, Conseillère régionale du Pays de la Loire
-
Gnamé BAGAYOKO, Maire Adjointe de Saint Ouen
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Catherine BARBOTIN, Maire Adjointe de Rennes
-
Véronique LE BIHAN, maire adjointe d’Aubervilliers et conseillère communautaire déléguée
-
Bertrand GALLET, directeur de CUF
-
Simone GIOVETTI, Chargé de mission CUF
-
Thierry TOUZET, chargé de mission à la mairie de Saint Ouen
-Et moi-même,
Christine RATZEL, maire adjointe d’Aubervilliers en charge de la coopération décentralisée et de l’économie solidaire.
Les élus composants cette mission étaient tous de gauche : PS, PC et Verts.
L’objectif de la mission de CUF était de pouvoir se rendre à Gaza pour rencontrer la population, les acteurs institutionnels des Nations Unies, le Centre Culturel français, le Maire de Gaza et les
membres du conseil municipal afin de se rendre compte et de pouvoir témoigner des dégâts causés par les bombardements israéliens sur la Bande de Gaza de décembre et janvier dernier, manifester sa
solidarité avec les Palestiniens et les institutions présentes sur le terrain, renforcer les liens entre les collectivités locales françaises et palestiniennes et avoir une meilleure compréhension
des enjeux entre les différentes composantes palestiniennes et israéliennes en présence.
Gaza et les territoires palestiniens
«
Dimanche 1er mars : Arrivée à Amman en Jordanie, première impression, il fait froid et il pleut, il neige presque. Nous sommes accueillis par A. Saqqour, réfugié palestinien originaire de
Naplouse en Cisjordanie. Il ne peut plus retourner en Israël. Nous attendons l’arrivée du reste du groupe Dimanche 1er au soir pour partir à Ramallah en Cisjordanie.
Lundi 2 au matin, départ pour la frontière jordano-israélienne. Première difficulté, Véronique Le Bihan est tracassée parce qu’elle a un visa syrien. Première inquiétude, est-ce que notre
mission s’arrête là ? Que faire si elle ne peut pas passer ? Plusieurs élus et notre directeur de cabinet que nous appelons en France, Mickaël Dahan, nous rassurent : 2 heures d’attente, c’est on
ne peut plus normal.
Ensuite, crise de paranoïa de certains : le jeune américain qui nous aborde serait-il un espion israélien ? La tension est d’ores et déjà palpable.
Je constate que les militaires chargés du contrôle des passeports sont jeunes, de 18 à 25 ans environ et armés de mitraillettes. Et les douaniers de mauvaise humeur ! Pas question de plaisanter.
L’accueil n’est pas vraiment chaleureux, c’est le moins que l’on puisse dire.
Certains on leurs bagages fouillés. L’état de guerre est permanent, ça ne fait aucun doute. Néanmoins, cela nous permet de comprendre d’emblée ce que peuvent vivre des migrants essayant de venir
dans nos états forteresses, en Europe. En effet, l'accueil dans nos ambassades de France pour avoir un visa lorsque l’on est ressortissant d'un état pauvre relève du parcours du combattant, sans
parler de l'accueil à l'aéroport par notre police aux frontières !
Mais revenons à Gaza : fort heureusement, nous finissons tous par passer.
Nous traversons alors en minibus un paysage assez dépouillé, voire désolé. De temps en temps, on nous indique une colonie parfaitement identifiable, souvent localisée en haut d'une colline,
entourée de grillages et ressemblant à un vulgaire lotissement.
Une heure plus tard environ, nous arrivons à Ramallah, ville Palestinienne de Cisjordanie, qui abrite le siège de l’autorité palestinienne, la Moukata. Yasser Arafat y est enterré. Ramallah serait
également la capitale de la Palestine si cet État existait. C’est également la ville dans laquelle est enterré Mahmoud Darwich, figure de proue de la poésie palestinienne, internationalement
reconnu, mort aux États-Unis l’année dernière, et qui s’est toujours battu pour son peuple martyrisé par l’histoire. Je ne peux m’empêcher de livrer une de ses citations :
"Mais nous souffrons d'un mal incurable qui s'appelle l'espoir. Espoir de libération et d'indépendance. Espoir d'une vie normale où nous ne serons ni héros, ni victimes. Espoir de voir nos enfants
aller sans danger à l'école. Espoir pour une femme enceinte de donner naissance à un bébé vivant, dans un hôpital, et pas à un enfant mort devant un poste de
contrôle militaire. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d'amour et de
paix. Merci pour porter avec nous le fardeau de cet espoir. "
Entrée dans Ramallah, avec « check point » et contrôle des passeports. Sur le fameux « mur de sécurité », nous y voyons inscrits des slogans d'espoir et parfois humoristiques, témoignant de
l’instinct de vie toujours présent au sein de la population, malgré cette guerre. Nous voyons un mirador et juste à l’entrée de la ville, un camps de réfugiés palestiniens gérés par les Nations
Unies.
J’avoue ne pas vraiment saisir la situation : pourquoi des palestiniens s’entassent-ils dans des camps alors qu'ils se trouvent en Cisjordanie, théoriquement « chez eux », dans leur pays ?
Nous rencontrons « le Negociation Support Unit » de l' OLP (Organisation de Libération de la Palestine). Ce service prend en charge la partie communication et réglementation pour l'OLP.
Le directeur nous fait une présentation d’environ deux heures de la situation des Palestiniens en Cisjordanie et à GAZA et du bilan de l’agression israélienne sur Gaza.
Résultats :
1314 tués, pour la plupart des civils, 412 enfants (31%), 110 femmes (8%)
5300 blessés, dont 1815 enfants (34%), 795 femmes (15%).
Le directeur du « Negociation Support Unit » souligne que des vies auraient pu être sauvées si les hôpitaux avaient fonctionné et si des évacuations avaient été rendues possibles par l’armée
israélienne.
4000 maisons on été détruites, 17 000 partiellement.
Situation de Gaza :
1,5 million de personnes dont 70 % de réfugiés. Ceux-ci devaient être indemnisés pour la perte de leurs terres. Ils vivent sur un espace de 365 km2.
Au niveau économique, le chômage est de 30 % en 2008 (19% en 2000).
Si 70 000 colons ont été évacués de Gaza, 300 000 sont entrés en Cisjordanie.
Le directeur du « Negociation Support Unit » nous rappelle la politique israélienne de morcellement du territoire palestinien par :
-la construction du mur (780 km),
-les colonisations (settlement) : en 1994, il y avait 200 000 colons. En 2009, ils sont plus de 500 000,
-les routes réservées aux colons,
-la limitation des déplacements par les check points.
Beaucoup de chiffres, mais également une carte très parlante qui montre l'évolution des territoires palestiniens de 1948 à nos jours. Le territoire des Palestiniens se réduit tel une peau de
chagrin, mité par les colonies, contraint par le mur, les check points, etc. Cela rend de moins en moins viable la possibilité d’un État palestinien.
Le directeur aborde ensuite la question de Jérusalem : la politique israélienne consiste à isoler Jérusalem Est de Ramallah et de Bethléem et de couper la Cisjordanie en deux.
Il nous donne un exemple concret: si un Palestinien de Bethléem veut vivre avec une Palestinienne habitant Jérusalem Est, il ne peut pas se rendre à Jérusalem et si elle-même vient à Bethléem, elle
perd son ID (identité israélienne). Mais le couple pourrait se voir avec des autorisations le week-end. Charmant !
Actuellement, des habitants de la vieille ville sont expulsés, accentuant les dégâts incommensurables d’ores et déjà causés par l’agression militaire israélienne sur Gaza.
Le rôle de la communauté internationale est ensuite abordé : celle-ci continue à coopérer commercialement avec l’état d’Israël (Mercosur, Union Européenne, etc.) et cela entretient le sentiment
d’impunité qui règne avec les violations répétées du droit international par Israël.
Nous ressortons de cet entretien assez dépités.
Mardi 3 mars, c’est enfin le départ pour GAZA, presque un mythe*!

Nous arrivons à Eretz, le point de passage du Nord permettant d’entrer dans la bande de Gaza.
Le Vice Consul est là, dans sa jeep blindée, accompagné d’un agent de sécurité armé. Tout cela pour nous ? Ils sont présents afin de faciliter le passage de notre groupe. Cela ressemble à un livre
de Marguerite Duras. Effectivement, il faut savoir que certaines missions politiques ou humanitaires ne passent pas !
Une sorte de ballon dirigeable avec une caméra surveille le territoire et notre groupe par la même occasion.
Nous passons un premier portail où nous devons spécifier si nous avons des armes. Bien sûr, il n’est pas question de plaisanter.
Comment décrire l’endroit ? Il faut passer derrière un haut grillage contrôlé par des militaires et des policiers armés de mitraillettes. Nous pénétrons ensuite dans un immense hall.
Il faut entrer dans un box pour présenter nos passeports et répondre aux questions des autorités:
« Avez-vous un autre passeport ? Votre nom? Etc. »
Pour moi, tout se passe bien.

Puis ce sont des couloirs fléchés que l’on traverse, sans personne, accentuant un sentiment de
totale déshumanisation. C'est oppressant, et il faut encore attendre que l'on daigne nous ouvrir une porte télécommandée débouchant sur un couloir de mur à ciel ouvert (bleu le ciel quant à lui),
puis une zone dévastée bordée d'un immense champs de verdure. Décor hallucinant, passage entre deux mondes, totalement désincarné.
Nous sommes attendus de l’autre côté par un chargé de mission de la mairie de Gaza et un traducteur. La frontière n'est qu'une barrière avec des hommes qui jouent aux dames, des
enfants qui vendent des boissons, le contraste est criant. Nous sommes rassurés, ayant enfin quitté cet univers aseptisé, toujours inquiétant quel que soit l'endroit.
De plus, le ciel est bleu, il commence à faire chaud et nous sentons que nous nous rapprochons de la mer Méditerranée.
Nous grimpons de nouveau dans un minibus. Cette fois, le territoire est contrôlé par le Hamas, et quelques barbes et voiles commencent à fleurir. Les voitures se font rares, remplacés par des
charrettes tirées par des ânes.

Nous traversons une zone bombardée : les immeubles sont écroulés, les usines
en tôle ondulées sont démolies, etc.
Premier arrêt, dans la zone économique de Gaza. La mission rencontre un chef d'entreprise qui produit des jus de fruits. Il nous montre les dégâts causés par les bombardements de
Tsahal : ses hangars ont été bombardés, notamment par des bombes aux phosphores, ses stocks de fruits ont été détruits, dégageant une forte odeur de pourriture, certaines cuves ont
été touchés, etc.
Néanmoins des réparations ont d’ores et déjà été effectuées pour que le minimum d'activité économique puisse reprendre. Quelques ouvriers sont sur une chaîne de conditionnement des bouteilles et
leur chef d’entreprise nous montre les restes d'obus qu'ils ont ramassé. Certains portent des inscriptions, dessins ou messages à destination des Palestiniens. Touchantes attentions des militaires
israéliens !
D’après les traces, on devine parfaitement que des chars sont entrés dans la cour de l'usine.
Pour des néophytes comme nous, nous en restons sans voix. Était-ce bien un objectif militaire ? Cette entreprise semblait sciemment visée, accentuant notre sentiment d’une volonté claire d’Israël
de détruire toutes les infrastructures qui pourraient viabiliser ce territoire, la Bande de Gaza. D’ailleurs, des traces d'obus sont également visibles dans l'hôpital situé juste en face de cette
usine.
A côté nous apercevons une école. Nous échangeons des signes avec les enfants qui chahutent et nous interpellent en riant.
Cette zone est étonnante, très contrastée, faite d'un côté de grands espaces verts et de l'autre d’habitations en partie dévastées.
Ce qui me touche plus particulièrement, c'est la dignité des personnes que l’on croise : aucun apitoiement. Elles détendent l'atmosphère dès que possible. Boissons et gâteaux nous sont offerts dans
la plus parfaite générosité. La vie continue quoi. Grande leçon d’humanité.
Nous arrivons à l'hôtel à Gaza City. L’édifice se situe face à la mer. Perspective étrange, faite de zones dévastées et de quartiers en cours de construction avec des immeubles flambants neufs,
parfois même très cossus. Qu’allons-nous donc encore découvrir demain ? »
Mercredi 4 mars : Visite à L'UNSCO (United Nations Special Coordinator Office for the
Middle East Peace Process, Bureau du Coordinateur Spécial des Nations Unies pour le
processus de paix au Moyen Orient)
Nous entrons dans une villa. Des carcasses de voitures des Nations Unies bombardées jonchent le sol et nous pénétrons dans un abri antiaérien.

Nous y sommes accueillis par Hamad El Bayari, qui travaille pour l'UNSCO. Il nous livre son
analyse : Depuis le début de la seconde Intifada, Gaza vit dans un état de siège permanent et
des campagnes médiatiques en Europe nous montrent les Gazaouis comme des terroristes.
Selon lui, Gaza n'est pas en crise humanitaire mais subit une crise de sa dignité. Le manque de tout est dû à la situation politique : en effet, 80 % des Gazaouis vivent de l'aide humanitaire.
Les discussions de Charm el-Cheikh, qui se sont tenues en Égypte le 2 mars 2009 entre les principaux donateurs internationaux à propos de la reconstruction de Gaza ont débouché sur une maigre
enveloppe de 5 millions de dollars. Or sans ouverture des frontières, cela ne servira pas à grand chose.
Hamad El Bayari donne un exemple sur la situation des pêcheurs qui ne sont plus autorisés à pécher qu'à 6 miles nautique. Avant, c'était 20 miles nautiques.
Monsieur Alexis MASLOW prend ensuite la parole. C'est un diplomate russe qui travaille depuis 30 ans à l’ONU. Il est arrivé depuis une semaine à Gaza. C'est un diplomate endurci qui est intervenu
dans des zones particulièrement conflictuelles : Irak, Bosnie, Timor Est, Sahara occidental. Bien que les employés des nations unies soient frustrés par le non respect des résolutions de l'ONU par
l'État d’Israël, il y a, selon lui, des raisons d'espérer : par exemple, le niveau d'instruction à Gaza est le plus élevé du Moyen Orient : 98% des Gazaouis sont complètement instruits, soit un
taux d’illettrisme de seulement 2%. La situation actuelle est très frustrante au regard du dynamisme économique des Gazaouis. Par exemple, Gaza est le cinquième exportateur de fleurs de la planète.
Pour Alexis Maslow, la situation n'est ainsi pas humanitaire, mais politique. Sans cette situation, les Gazaouis seraient bien plus riches que bien des peuples sur la planète. Le diplomate insiste
pour que l'ouverture des frontières ne se limite pas à Rafah (la frontière entre Gaza et l'Égypte)
Nous traversons ensuite Gaza City. Les infrastructures gouvernementales ont été touchées, un bâtiment colossal abritant un ministère est complètement détruit explosé. Les fils sortent de partout,
il n'y a sans doute « plus rien à en tirer ». Notre groupe visite un stade aménagé par… la ville française de Dunkerque ! Les chars israéliens sont visiblement entrés sur le terrain, brisant les
escaliers et les réverbères. Malgré cela, les jeunes Palestiniens ont réinvesti les lieux et se livrent à une partie de foot à l’heure où l’on visite le stade.
Cette « promenade », qui n'a rien de touristique, nous permet de prendre pleinement conscience des cibles visées par l'armée israélienne : les infrastructures gouvernementales et les installations
nécessaires à la vie courante : réverbères, usines de traitement de l'eau, commissariats, stades, zones économiques, etc.
Visite de l'UNWRA (United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East)
Nous rencontrons un sacré personnage, Monsieur John Ging, le directeur, qui ne laisse personne indifférent par son franc parlé. Il a du mal en effet à contenir sa colère quant à la situation de
Gaza. Nous allons parfaitement le comprendre ensuite en visitant les entrepôts de l'UNWRA.

John Ging aborde d’emblée la question de la justice et de la vérité. Il nous rappelle que les
Gazaouis sont des êtres « civilisés » et que nous devons nous préoccuper de la sécurité des populations civiles. Pour lui, les Gazaouis sont illégalement et collectivement punis à cause des
agissements d'un tout petit nombre d'entre eux. Le directeur de l'UNRWA nous rappelle que les punitions collectives sont illégales au regard des conventions des Nations Unies et du droit
international. De son point de vue, le dernier conflit est la preuve certaine d'un échec collectif. Des centaines d'enfants ont été tués, mais rien n'a changé positivement à Gaza.
Aujourd'hui, il y a un seul point de passage pour le matériel et la nourriture alors qu'il y en avait encore deux il y a trois mois.
Si les Israéliens ont dit vouloir détruire les infrastructures du terrorisme, ils ont détruit l'école américaine, l'infrastructure économique de Gaza, les bâtiments construits par l'Europe, des
milliers de maisons ! Mais les tunnels eux sont encore là! Pourquoi ? Tous les éléments de viabilisation d’un futur État palestinien ont été détruits ! De même, plus de 400 enfants ont été tués.
Pourquoi ? Les parents veulent obtenir une réponse, soit par la loi, soit par les armes.
Les pères et mères doivent avoir une réponse à la mort de leurs enfants, sinon c'est l'échec de la loi et la violence prédominera.
Actuellement, il y a un seul point de passage par où l’essence entre en très petite quantité.
Lorsque les pâtes, le riz, le papier sont rationnés, est-ce une question politique ou de sécurité ?
Il faut lutter pour avoir du papier. Le Hamas pourrait avoir le papier, donc l’UNWRA ne peut pas obtenir du papier pour les manuels scolaires des enfants. Logique implacable !
« Nous sommes contre le terrorisme mais s'il n'y a plus de manuels scolaires, comment combattre alors le terrorisme sans possibilité de diffuser le savoir ? ».
Monsieur Ging rappelle
avec force que le droit international doit être respecté. Combien de fois a t’on entendu dire que le Hamas se servait de la population comme « bouclier humain » ? Il semble pourtant bien qu’ici ce
soit bien les Israéliens qui aient tiré sur des civils. Pour le directeur de l’UNRWA, les individus doivent répondre de leurs faits. On ne
doit ainsi pas tirer sur les otages mais sur ceux qui détiennent les personnes en otage. Le gouvernement israélien doit donc s'expliquer. Tout le monde parle de politique concernant la situation au
Proche Orient, or il s’agit de parler de droit! La population de Gaza a des droits, et elle n'a pas à supplier pour les faire respecter. C’est cette réalité qui entretient le terrorisme.
Et les civils israéliens souffrent également, car il y a plus de roquettes aujourd’hui qu’avant l’offensive israélienne. Pour John Ging donc, « succès zéro » de l’agression israélienne.
Après ce « coup de gueule », il nous rappelle les missions de l'UNWRA : couverture des besoins alimentaires, scolarisations des enfants (200 000 enfants et 8000 enseignants), programme de
construction de logements, gelés depuis le blocus, programme d'emplois provisoires (10000 personnes) pour permettre d'avoir des moyens supplémentaires pour aider les familles à vivre dans la
dignité, programme de micro-finance pour les projets de microentreprises sous forme de prêts remboursables, service social pour les plus démunis, service minimum de santé (1500 personnes pour 20
centres de santé). Depuis 8 ans, l’UNRWA assure également un programme d'urgence (alimentaire, argent, emploi). 80% des réfugiés palestiniens dépendant de l'assistance de l'UNWRA et ce chiffre
s'est élevé à 90 % ce mois ci, les fonctionnaires gazaouis n’ayant entre autre pas perçu leur salaire. Les habitants de Gaza reçoivent une aide alimentaire sous forme de produits de première
nécessité, sévèrement contrôlés par Israël. Il existe une liste de 14 denrées (farine, huile, sucre, riz, etc.). Au moment même où monsieur Ging nous parle, certains camions de denrées alimentaires
se voient refusés l’accès à Gaza. Depuis 8 ans, les Gazaouis vivent avec cette ration alimentaire d'urgence.
Le directeur de l’UNRWA nous rappelle ensuite les engagements internationaux en décembre 2005 et les transactions entre Israël et l'Autorité Palestinienne concernant le retrait des colons de la
bande de Gaza, qui laissaient espérer alors la construction d'un état palestinien en juin 2006. Le résultat des élections à Gaza a tout changé : la population a voté et la communauté internationale
n'a pas accepté son choix. Belle leçon de démocratie de la part de l’Occident !
Le habitants de Gaza ne peuvent pas aller en Cisjordanie. La population de la Cisjordanie souffre également, avec plus de check points israéliens, plus de colonies, etc.
« Les gens ordinaires souffrent partout ! »
Si l'UNWRA existe encore après 60 ans, c'est un échec politique! Mais l’agence des Nations Unies reste indépendante et elle est critiquée pour cette indépendance.
Il y a deux semaines, le Hamas a volé un stock de nourriture. L'UNWRA a alors exigé le retour des produits et le Hamas a tout ramené après s’être engagé à ne pas recommencer.
Pendant les bombardements, le personnel de l'UNWRA est resté. 50 000 personnes se sont alors réfugiées dans ses écoles.
Monsieur Ging insiste sur le fait que les enfants de Gaza sont éduqués à la tolérance alors que les Israéliens ne respectent pas les accords internationaux, ni même les résolutions de l'ONU.
Comment alors rester crédible ? Il prend comme exemple le fait que John Kerry est venu dans la Bande de Gaza en toute tranquillité. Si on prenait John Kerry en otage, combien de prisonniers
palestiniens seraient libérés ? Pour le directeur de l’UNRWA, les Gazaouis n'ont pas de haine en eux.
Mince lueur d'espoir : Bernard Kouchner a admis dans un article du « Hérald Tribune » que le droit international n'était pas respecté à Gaza, au Darfour et au Congo.
Monsieur Ging demande à ce que le Conseil de sécurité des Nations Unies prenne ses responsabilités pour séparer le politique du droit international. Il conclut en rappelant que nous fêtons le 60e
anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Or s'il n'y a pas d'état de droit, les êtres humains devront recourir à la force.
J'adhère à cette conclusion. En effet, la question est bien celle de l'égalité des droits humains entre Palestiniens et Israéliens sur cette petite portion de territoire.
Visite des hangars de l'UNWRA

Nous visitons ensuite les locaux de l'UNWRA qui ont été bombardés lourdement pendant l’incursion
de l'armée israélienne.
Une directrice, nous explique la journée infernale qu’elle a passée sous les bombardements.
L'UNWRA a été pris pour cible. Les hangars contenant des stocks d'aliments, de papiers, de médicaments ont été détruits. Il y en avait pour environ un million de dollars. Bien que protégés dans les
abris, les employés ont du sortir pour dégager des éclats de bombes aux phosphores encore fumants au risque sinon que ceux-ci ne fassent exploser des camions citernes remplis d'essence sous
lesquels se trouvaient les employés.
La directrice nous montre un impact d'obus qui n'a pas explosé mais qui aurait pu faire explosé les stocks d'essence se trouvant dessous. On imagine alors l'impact sur le quartier.
L'UNWRA est au coeur d'un quartier peuplé. Nous comprenons la colère de ces « agents de la paix », victimes eux aussi de l'armée israélienne.
Pour ma part, je comprends cette stratégie d'Israël comme une volonté de chasser les organisations internationales afin d’étrangler la population palestinienne pour qu'elle fuit Gaza.
Pause repas
Notre temps est très limité. Pas question de traîner même si nous prenons plaisir à contempler la mer pendant la pause repas. Nous constatons d’ailleurs que sur la mer comme sur la plage,
il y a peu très peu d'activité.
Parmi les clients, il y a un groupe de jeunes femmes dont l'allure très occidentale contraste avec les femmes que nous rencontrons depuis notre arrivée à Gaza. Elles aussi profitent du soleil en
mangeant des glaces.
Visite au CCF
Nous sommes ensuite invités au vernissage d'une exposition organisée au Centre Culturel Français. C'est le seul centre européen qui reste, le centre culturel britannique ayant plié bagage pour le
moment. L'espace est impressionnant par son calme et sa fraîcheur, c'est une bâtisse située dans un grand jardin, épargnée par les destructions.
Nous sommes accueillis par une centaine de personnes, dont la moyenne d'âge est de 20- 25 ans. Cela ne me change guère de la mission locale à Aubervilliers, à la différence que je sens ici un
enthousiasme, je dirais une joie de vivre, que j'aimerais parfois ressentir plus souvent chez « nos jeunes » en France.
Des jeunes femmes nous lisent des textes de leur expérience du conflit qu'elles viennent de subir. Salma Ahmed, dont les témoignages figurent dans le livre GAZA, lit son texte. Je vais pouvoir
rencontrer cette jeune fille dont le texte m'a fortement ému.
Voici un extrait en exclusivité:
Chers amis,
Hier, je ne vous ai pas écrit pour vous dire que les Israéliens ont bombardé la station de la radio Al-Aqsa, qui se trouve dans un bâtiment au milieu de Gaza, à cinq heures du matin…
Ma soeur a quitté la maison avec ses enfants car ils se trouvaient dans un quartier très dangereux. Ils vivent chez moi depuis avant-hier. Je souffre de voir mes nièces vivre la même enfance que
moi. Elles posent sans cesse des questions sur ce qu'il se passe autour de nous depuis des jours. Ma nièce de 5 ans voulait dessiner. Elle a fait des fleurs et des animaux.
Elle a entendu une explosion et a décidé d'ajouter un soldat israélien. Ne les ayant encore jamais vu, elle m'a demandé comment ils étaient.
« Imagine-les », lui ai-je répondu.
« J'imagine qu'ils ne sont pas beaux! »
« Et elle a dessiné un soldat comme un monstre portant ses armes et a enchaîné: « Pourquoi ces soldats ne nous aiment pas ? Pourquoi ils ne rentrent pas chez eux ? Pourquoi ils détruisent nos
maisons ? Pourquoi ils ne nous laissent pas jouer? »
Salma Ahmed, le 5 janvier 2009.
Cette jeune femme est professeur et a enseigné 2 ans dans un lycée de Caen. Elle est revenue à Gaza non sans difficulté. Le consulat de France est intervenu pour qu'elle puisse
revenir. Je lui parle. La rencontre est assez émouvante. Je fonds en larmes et elle me console, gênée par mes larmes.
Eh oui, je tiens à en parler parce que je suis frappée par la pudeur de ces personnes qui jamais ne nous font porter le fardeau de la situation terrible dans laquelle ils se trouvent !
Le maître des lieux lui aussi est plein d'allant et souhaite que le CCF reste un endroit vivant. Il constitue une bouffée d'air pour ces jeunes gens qui peuvent consulter Internet, emprunter des
livres à la médiathèque ou encore apprendre une nouvelle langue, fenêtre sur le monde.

Nous offrons deux exemplaires de « ELLE et LUI », ouvrage de photos de jeunes couples mixtes
réalisé par des collégiens d’Aubervilliers. Il nous invite à continuer d'envoyer des
artistes de France à Gaza, même si les démarches sont difficiles.
J'ai réellement envie qu'on puisse travailler avec ces jeunes de Gaza dans le cadre de la Coopération décentralisée, qu'on mette en place des échanges de correspondance par Internet
et que l’on suscite des passerelles avec nos artistes locaux. (Voilà mes doléances, Monsieur le Maire! )
Je suis fière que nous ayons un tel espace dans une zone qui pour beaucoup est une sorte de no man's land! Pourtant il y a du monde, et bien vivant !
La nuit tombe très vite en ce moment. Vers 18h 30 il n’y a déjà presque plus de lumière. La zone de l'hôtel est peu éclairée, mais avec quelques uns, nous partons voir le petit port de
pêche tout proche. Nous rencontrons trois gamins qui vendent des chewing-gums et qui nous accompagnent au port. Ils parlent arabe et veulent des pièces mais nous n'avons pas grand chose sur nous!
Question toujours compliquée, est-ce qu'il faut donner des pièces ou non ?
Ils veulent se faire prendre en photos, (ça c'est plus simple!). Nous découvrons le lendemain que deux d'entre eux sont sur les photos qui illustrent les documents de communication sur les
activités de l'UNWRA avec les enfants. Rencontre chaleureuse qui donnent envie d’essayer de changer concrètement la vie de ces enfants !
Le port est très modeste en raison de la zone de pêche très limitée et qui a comme effet d'épuiser la réserve halieutique, privant aussi les pêcheurs de revenus (mais je ne le saurai qu'à mon
retour en lisant l'article extrait du rapport de l'OCHA). Nous voyons au loin les lumières du port de la ville israélienne d'Ashkelon, qui, lui, a un très gros fret.
Dîner ensuite avec le maire officiel de Gaza City.
Nous apprenons que suite à différents problèmes entre l'Autorité Palestinienne et le Hamas, un deuxième conseil municipal a été formé par le Hamas. Il y a ainsi deux conseils municipaux ?!
Voyage à RAFAH
Le lendemain, réveil matinal et départ pour la zone de RAFAH, située à la frontière égyptienne. La ville de Saint Denis est jumelée avec Rafah.
Certains d'entre nous ont entendu des coups de feu mais personne ne sait d'où ça venait. Nous longeons cette splendide côte méditerranéenne. Les plages sont quasiment désertes. Nous observons les
anciennes colonies israéliennes. Nous passons devant Khan Yunès.
Tous ces noms étaient, jusqu'à peu, si loin de mon quotidien ! Dans le denier film du réalisateur israélien Ari Folman, « Valse avec Bachir », qui a tant défrayé la chronique, il est
question de Khan Yunès.
Nous constatons que des programmes de logement sont restés inachevés fautes de matériaux.
Rafah est séparé de l'Égypte par un épais mur entouré de barbelés. Je n'imaginais pas que l'Égypte était si proche. A proximité des tunnels, toutes les habitations sont totalement
détruites.
Nous descendons de notre camionnette et nous remarquons les endroits qui sont susceptibles d'être des entrées de tunnels. Ceux-ci ont une fonction vitale pour les Gazaouis. Ils leur permettent
d'acheminer des vivres, des denrées que les commerçants revendent, des matériaux de construction, etc. C'est aussi une bouffée d'air frais! Certains peuvent parfois sortir pour quelques jours en
Égypte.

Tout cela me fait penser à l'économie de guerre qu'ont pu connaître nos grands-parents : marché noir et ticket de rationnement.
J'aime à penser que malgré tous les obstacles, tous les murs, toutes les barrières, il y a toujours moyen de passer à travers!
C'est ce que je me dis également quand je reçois des immigrés sans papiers, malgré tous les
obstacles que nos sociétés gâtées leur dressent. Rien ne pourra arrêter « le désir d'ailleurs » et la nécessité de vivre malgré tout de l’humanité.
Retour à l'hôtel.
Rencontre avec l'association ACTED.
Nous sommes accueillis par une longue délégation de paysans qui semblent très émus par notre présence. Ce sera sans doute les seules vraies « personnes » que nous pourrons rencontrer dans le temps
qui nous est imparti. ACTED est une ONG (organisation non gouvernementale) qui a des programmes dans le monde entier.
Nous assistons à une distribution de légumes et de fruits par ACTED. C'est un programme spécifique où des paysans organisés en coopérative produisent des légumes qui sont ensuite distribués,
permettant d'employer les agriculteurs et d'assurer un complément alimentaire au programme de l'UNWRA.
Nous sommes impressionnés par la taille et la qualité des légumes. Effectivement, sous ce climat tout pousse ! Comme je reviens d'une mission dans le sud de la Mauritanie où l'accès à l'eau et le
maraîchage sont difficiles, je me dis qu'au moins ici ils ne manquent pas d'eau !
Pour l'instant, il y en a suffisamment même si la ressource en eau est très fragile dans la bande de Gaza et l'eau est plutôt une question de « paix ».
En sortant, nous percevons des coups de feux et nous ne sommes pas rassurés. En fait ce sont des policiers qui tentent de faire revenir le calme suite à l'interpellation d'un individu. Des coups de
feux en l'air, ce n'est pas dans nos habitudes, même en Seine Saint Denis !
Rencontre avec l'organisation « Palestinian Centre For Human Rights » (PCFHR) : le délégué de l’ONG rappelle le processus de démocratisation qui existe depuis 4 ans, avec les élections
présidentielles, législatives et municipales. Depuis lors, il y a deux gouvernements :
un à Ramallah et un autre à Gaza, chacun nomme de nouveaux maires, ceci en raison de la détérioration de la situation.
Trois facteurs expliquent cela :
1. L'escalade de la violence des soldats israéliens, la multiplication des check points en Cisjordanie, la guerre totale contre Gaza,
2. Le positionnement de la communauté internationale pris après les élections législatives de 2005, qui au lieu d'encourager le processus de démocratisation a conduit au boycott de la
Palestine.
3. La lutte interne entre les Palestiniens : en 2007, la liste des victimes de la lutte interne entre Palestiniens est plus importante que les victimes des balles israéliennes.
Mais cette lutte ne désengage pas la communauté internationale de ses responsabilités. Le gouvernement d'Union Nationale a été boycotté. Aujourd'hui un dialogue sérieux interpalestinien reprend au
Caire. Parallèlement, la communauté internationale promet beaucoup d'argent, mais s'il n'y a pas un réel changement, comme la levée du siège de Gaza, cela ne servira pas à grand-chose. De la même
manière, le résultat des élections israéliennes est une
poussée très à droite de l’échiquier politique israélien. Pas encore assez du point de vue de la communauté internationale pour qu’elle prenne conscience de ses responsabilités ?
Qu'est-ce qu'Israël a offert à Mahmoud Abbas en échange du processus de paix? Pour lui, les Israéliens veulent la terre palestinienne sans les Palestiniens! Tel Aviv veut faire durer le processus
de paix pour continuer sa politique de colonisation dite du « fait accompli ».
Selon le délégué du PCFHR, le dialogue inter palestinien doit être soutenu par la communauté internationale et le choix du peuple palestinien doit être respecté.
Jean Philippe Magnen demande quelles sont les activités du centre depuis la guerre. Est-ce qu'il existe des réseaux des droits de l'homme de chaque côté des frontières ?
Le centre apporte une assistance juridique aux victimes en Palestine et en Israël. Des poursuites ont été lancées contre sept membres de l'armée et deux ministres. Le délégué ne compte pas sur la
justice israélienne dont il doute de l'impartialité. Le centre enquête sur les cas de violation des droits de l'homme. Il y a des enquêteurs sur le terrain et les enquêtes sont ensuite rendues
publiques.
Autre question : y a-t-il des militants sur le terrain et quelle est la place faite aux femmes? Il existe une unité spéciale par rapport aux droits des femmes, et deux ou trois autres centres de
défense des droits de l'homme à Gaza.
Sur les cinq chefs d'unité de leur ONG, deux sont des femmes.
Parmi les 600 observateurs aux dernières élections législatives palestiniennes, la moitié était des femmes. Voici un exemple à suivre.
Pour conclure, le délégué PCFHR estime que le droit est sacrifié pour les intérêts des puissances. Les palestiniens n'ont pas beaucoup d'espoir mais il faut continuer à les aider. Il y a beaucoup
de frustration mais il faut garder espoir.
J'essaie aussi d'être optimiste et je me dis qu'en matière de relation internationale, tout peut changer très vite!
Mon esprit décroche, j'aimerais passer plus de temps à me mêler à la population. Nous regrettons tous de n'avoir pas eu le temps de marcher dans les rues.
Il faut quand même le dire la vie est là, il y a de l'activité dans les rues, il y a des commerces,
les écoles sont ouvertes...
Nous passons visiter l'hôpital Al Quds du croissant rouge islamique (Jérusalem)
Devant l'hôpital, il reste des carcasses d'ambulances. Dans la façade, on peut voir des trous d'obus et de bombes. Nous pénétrons dans un hôpital éventré avec de nombreuses salles détruites, (déjà
des nouveaux lits sont arrivés), puis nous rejoignons un second bâtiment complètement détruit, le foyer de l'hôpital, c'est à dire la cuisine et une salle de théâtre où le CCF a l'habitude de
produire les spectacles.
Le médecin qui nous reçoit nous explique la vie de l'hôpital pendant les bombardements et les difficultés pour les équipes étrangères de venir les aider, par exemple, l'association « help doctors »
de Lille qui a réussi à entrer dans Gaza sous les bombardements.
Il évoque un détail qui lui tient à coeur et qui retient mon attention : le théâtre a été détruit ainsi que les fauteuils dont les tapisseries ont été confiées à des handicapés pour leur donner des
revenus (petite leçon d'économie solidaire).
Pendant notre visite à l'hôpital du Croissant Rouge à Gaza City, dévasté, j'ai ramassé un dépliant écrit en arabe mais illustré qui m'a permis de comprendre qu'il mettait en garde les enfants de
jouer dans des décombres ou des gravats au risque de sauter sur une roquette, une bombe non explosée. Triste réalité des lendemains de conflits!
Le soir, nous rencontrons les femmes du conseil municipal :
C'est une situation complexe ! Elles représentent le conseil municipal formé par le Hamas.
Elles sont trois, dont une complètement voilée. Elles sont accompagnées d'un conseiller. Nous nous présentons. Toutes sont très diplômées, architecte, ingénieur, etc. D'entrée de jeu, l'une d'elle
tient à souligner qu'elles ne sont pas des « terroristes ». Elle fait ensuite référence à la Révolution française et à l'action des femmes révolutionnaires qui vendaient leurs bijoux pour soutenir
la révolution. Ces conseillères municipales n’en feraient pas moins.
Nous ne sommes pas à l'aise. Le décalage à ce moment précis est trop important.
Quels sont les services publics rendus aux femmes ? Centres culturels, programme de sensibilisation à l'environnement, nouveau programme d'aide psychologique aux femmes et aux enfants, artisanat,
centre de récréation pour écoliers qui se rendent à tour de rôle à l'école (par ½ journée) et où sont développées des activités de poterie, de chant, de jeux, etc. Leurs moyens sont très
limités.
Gaza est la première ville de Palestine à mettre en place un « petit parlement » pour les enfants. Cette expérience a été reprise dans d'autres villes arabes.
On voit bien que les préoccupations concernant la jeunesse et les femmes de Gaza rejoignent celles de nos villes!
Nos interlocutrices souhaitent savoir ce que nous mettons en oeuvre en France pour les femmes afin qu'elles puissent s'inspirer de nos expériences. Est-ce que nous avons quelques choses à leur
apprendre ? Je ne suis pas sûre. Ce dont elles manquent ? Des moyens et de la liberté.
Je pose une question provocatrice : est-ce qu'elles pensent qu'un état binational laïc est possible ? Pour elles, c'est impossible ! Sans religion, point d'état ! Évidemment, je connaissais la
réponse, comme me le fait remarquer notre interprète visiblement irrité par ma stupidité!
J'ai posé la question, parce que c'est l'idée exprimée par une jeune artiste gazaouie, qui témoigne dans « Gaza », de son désir d'un état laïc binational. Je voulais me faire l'écho de cette jeune
femme faisant entendre un autre son de cloche dans lequel je me reconnaissais bien. Nous pensons que le conseiller qui les accompagne est là pour contrôler leur propos !
Une autre partie du groupe s'est entretenue avec le responsable du réseau d'assainissement. La question de l'eau et de l'assainissement a été prégnante dans nos rencontres. Les bombardements ont
détruit en partie le réseau d'assainissement, provoquant des pollutions de la nappe phréatique, qui, par ailleurs, est fragile en raison de la présence de la mer et des risques de salinité, ce qui
peut la rendre impropre à la consommation.
Dernière soirée à Gaza !
Ce soir, j'entends les coups de feu vers minuit! Je vais à la fenêtre mais je ne vois rien! Je lis aux informations que Rafah a été bombardé. Nous étions déjà partis. J'apprends qu'à Jabaliya, il y
a eu deux morts. Tout cela semble complètement irrationnel et lointain !
3ème Jour : Jeudi 5 mars
On échange sur les tirs de cette nuit, l'un d'entre nous a vu des éclairs de tirs sur la mer.
Retour vers la frontière
Nous sommes émus de laisser ces enfants, ces femmes, ces hommes qui, malgré la situation,
restent debout et bien vivants !
Les personnes qui jouaient aux dames sont encore là! En fait ce ne sont pas tout à fait les mêmes règles que celles que nous connaissons selon le Maire de Lamballe qui se laisse prendre au jeu!
Nous réempruntons le tunnel à ciel ouvert, j'entends pourtant des tirs, ça ne me rassure pas mais je ne vois rien absolument rien.
Même « cirque » pour passer : cette fois, nous passons chacun notre tour dans un sas, scannés les mains en l'air. Quelques questions d'une voix qui sort d'un micro. Je lève les yeux et je vois d'où
vient cette voix. Cela me rassure, j'ai du mal à parler dans le vide. « Big brother is watching you! »
Nos valises sont fouillées. Scène comique : l'un d'entre nous à des embauchoirs dans ces chaussures. Il doit alors sortir ces chaussures de sa valise, et ensuite du sac qui les protège. Et oui,
même en mission on peut prendre soin de ses chaussures ! Ensuite, notre compagnon de route doit sortir ses embauchoirs. Tout cela prend bien entre 20 et 30 minutes. Moins drôle, deux d'entre nous
sont soumis à des vérifications plus personnelles, avec plusieurs séries de
questions. Nous sommes tendus. Pour un peu nous serions pris pour des espions.
Nous constatons que des familles palestiniennes sortent de Gaza, visiblement à la suite de règlements de compte entre le Hamas et le Fatah.
Malgré tous ces salamalecs, nous sortons tous en peu de temps et nous partons à nouveau pour Ramallah. La journée sera consacrée à rencontrer des ministres de l'Autorité Palestinienne. Ce sont
certainement des figures de la lutte palestinienne. Moment laborieux, la fatigue commençant à se faire sentir. Les bâtiments de l'Autorité Palestinienne sont plutôt austères.
Rencontre du ministre des collectivités territoriales : Monsieur Ziad Al Bandak
Monsieur Josselin interroge le ministre sur les conséquences des négociations de Charm el Cheikh :
« Quelle part le ministère pourrait prendre à ces négociations ? Par ailleurs, à Gaza, comme certaines mairies sont dirigées par le Hamas, comment éviter que la population ne soit pas punie
pour cela? »
Le ministre répond : il y aurait 3 milliards de dollars consacrés à la reconstruction.
« Qu’en est-il de l'occupation? »
Après les élections de 2006, les relations sont devenues difficiles avec Gaza. Il reste néanmoins possible de contacter directement certaines
municipalités. Le Hamas domine la situation politique et a demandé la démission du Conseil Municipal. Le ministre parle d'un «
coup d'état ». Malgré cela, le programme avec la Banque
Mondiale se poursuite à Khan Yunès, Rafah, Gaza. Ce programme finance par exemple le fuel pour les déchetteries, la construction de murs de soutien, etc.
Pour le ministre l'objet est d'arriver à un état palestinien au regard des accords de juin 1967, à l’issue de la « Guerre des six jours ».
Le dialogue entre l'OLP, le Hamas et toutes les factions doit permettre d'arriver à un gouvernement d'entente national pour éviter qu'Israël ne soulève le prétexte du désaccord pour ne pas faire un
pas en direction de la création d’un État palestinien viable.
Je dois dire que ce n'est pas la partie la plus intéressante. Je commence en fait à être lessivée par le rythme des réunions. Les échanges se font en Anglais et en Arabe avec un traducteur, ce qui
n’est pas de tout repos.
Le ministre des Affaires Étrangères, Monsieur Riad Malki
Monsieur Malki ne s’est pas encore rendu à Gaza depuis les bombardements. Il revient tout juste de la Conférence de Charm el-Cheikh, à laquelle 72 pays ont participé, dont tous les ministres des
Affaires Étrangères des pays arabes afin de soutenir le dialogue inter palestinien.
Charles Josselin interroge le ministre sur son espoir d’une éventuelle levée du blocus. Le ministre répond que les palestiniens ont besoin d'un soutien. Certes !
En 2002, il y a eu l'incursion de l'armée israélienne en Cisjordanie, dont à Ramallah. Cette incursion a détruit l'infrastructure mise en place par l'Autorité Palestinienne. Il y a eu également le
massacre de Jenine.
Le ministre palestinien parle du travail méthodique des Israéliens pour empêcher la croissance naturelle des capacités des Palestiniens et affaiblir l'Autorité Palestinienne afin ensuite de faire
valoir que celle-ci ne peut constituer un partenaire viable pour négocier.
En Égypte ont lieu actuellement les négociations pour lever le blocus et renforcer l'unité palestinienne afin d’affronter la situation. L’heure n’est pas aux divisions ! La réunion du 26 février
2009 entre les différentes factions palestiniennes est à ce propos encourageante.
Une nouvelle rencontre est prévue le 10 mars 2009.
L’échéance est fixée fin mars pour se mettre d'accord sur un gouvernement d'entente qui représenterait tous les Palestiniens afin d’obtenir la levée du blocus.
Novembre 2007, le Processus d'Annapolis prévoyait la fin de la politique d'implantation des colonies. En 2008, il y a 17 fois plus de colonies. Quel succès ! Ceci démontre qu'Israël n'a pas du tout
la volonté de mettre fin à cette politique pour permettre la construction d’un état palestinien viable doté de tous les instruments de la souveraineté.
Charles Josselin pose alors les questions suivantes :
« La communauté internationale fait preuve de trop d'indulgence et se rend ainsi complice du comportement d’Israël. L’élection de Barack Obama aux États-Unis a suscité des espoirs :
est-ce que l'intervention de Mme Clinton donne l'impression d'une volonté plus forte de la diplomatie américaine de régler réellement ce conflit, ou bien n'y a-t-il aucun changement? »
Réponse du Ministre :
« Le rôle de l'Union Européenne? Malgré la responsabilité d'Israël, l'Union Européenne a décidé de rehausser ses accords de coopération avec Tel Aviv, le 8 décembre 2008. Cette décision a été prise
pendant la présidence française de l’Union. Durant la première moitié de l’année 2008, la présidence slovène avait au contraire condamné les implantations israéliennes. La Grande Bretagne avait
également décidé d'interdire l'importation de produits
venant des colonies et des sociétés traitant avec les colonies. Israël a de plus démoli des maisons à Chafat, près de Jérusalem (Siloam).
Prévisions : 73 000 unités de logements en Cisjordanie sont prévues par Israël, soit 290 000 nouveaux colons, qui viendront s'ajouter aux 200 000 colons déjà présents, plus les 289 000 colons de
Jérusalem Est. Ces transferts de colons en provenance d'Israël dans les territoires de Cisjordanie sont un frein certain à l'établissement d'un état palestinien viable. De plus, le prochain
gouvernement israélien (droite alliée à l’extrême droite) ne voudra pas d'un état
palestinien indépendant. Comment pourrons-nous traiter avec ce gouvernement ? La communauté internationale devra assumer sa responsabilité et vraiment travailler pour la paix dans la région.
»
Constat sombre, néanmoins le ministre se montre optimiste quant à la nouvelle administration américaine.
Hillary Clinton a rencontré le 1er ministre de l'Autorité Palestinienne, Salam Fayyad. Le ministre nous fait part de sa crainte que l'opportunité de l'élection d'Obama disparaisse avec l'élection
de Benyamin Nétanyahou. Il ajoute que l'Union Européenne doit conserver une place importante dans l’élaboration de la paix dans la région.
Monsieur le premier ministre : Salem Fayyad
Avec la conférence de Charm el-Cheikh, la communauté internationale a démontré qu'elle était présente pour aider la Palestine et qu'elle était prête à donner plus que ce qui était demandé.
Néanmoins de nombreux États se sont demandés si ce qu'ils allaient payer n’allait pas une nouvelle fois être détruit par Tsahal. Va-t-on en finir avec le cycle
construction/destruction et réussir à faire cesser l'occupation israélienne. Il y a eu un vote de confiance et de reconnaissance qui a amené les bailleurs de fonds à transférer l'argent directement
à l'Autorité Palestinienne.
Le mécanisme de reconstruction de Gaza : la communauté internationale a dit clairement qu'elle voulait aider l'état palestinien. Or le blocus de Gaza risque de ruiner cette reconstruction. La Bande
de Gaza est une prison à ciel ouvert. Israël en la matière ne respecte absolument pas le droit international.
L'Union Européenne et la communauté internationale doivent bien considérer qu'Israël est un État comme les autres et qu'il doit appliquer les décisions de l'ONU et non les prendre comme de simples
recommandations. Le premier ministre palestinien interroge l'Europe à travers nous. Pourquoi par exemple l'Europe a toujours son marché ouvert aux produits en provenance des colonies ? Lorsque
l'Union Européenne se posera ce genre de questions, on observera sans doute un changement dans la politique Israélienne. Sans cela, Tel Aviv n’aura pas de raison de revoir sa politique à l’égard
des territoires palestiniens. Sans compter qu’aujourd'hui, une société française construit un tramway à Jérusalem Est, entérinant de facto les colonies israéliennes illégales, Alsthom.
Quant à la nouvelle administration américaine ?
Il y a des raisons d'être optimiste car Obama et sa secrétaire d'État Hillary Clinton ont l’intention de changer de cap par rapport à l’administration Bush sur le dossier du Proche Orient. La
nouvelle administration a demandé l’arrêt des incursions israéliennes dans les territoires palestiniens ainsi que l’arrêt des colonies. Hillary Clinton a souligné l’importance du respect de la
feuille de route des DEUX parties. Il faut également permettre aux Palestiniens de se déplacer entre Gaza et la Cisjordanie. La Palestine a fini par reconnaître Israël, maintenant Israël doit faire
de même. Pour le 1er ministre, le dialogue inter palestinien est possible et nécessaire. C'est une priorité.
Ce soir, c'est ballade dans Ramallah. Nous atterrissons dans un bar restaurant tenu par un artiste. Ses oeuvres font partie intégrante du décor. C'est magnifique! La clientèle est très diversifiée,
l'alcool est autorisé, il y a une bonne ambiance, ça fait plaisir à voir !
Vendredi 6 mars : visite de Beit Jala
Dans le cadre de ma mission, étant élue à la coopération décentralisée d’Aubervilliers, il était indispensable que je rencontre le Maire de Beit Jala, municipalité située en Cisjordanie avec
laquelle nous avons une coopération depuis presque 10 ans. Cette coopération tourne essentiellement autour d’échanges de jeunes.
Départ très matinal. Nous laissons le groupe pour cette visite. Ils auront la chance de faire une grasse matinée, la seule du séjour, les veinards !
Le contraste entre les municipalités de Gaza et de Beit Jala est frappant. A Beit Jala, j’ai soudain l’impression d’être dans un paisible village du sud de la France, voire de l’Italie. Il faut
préciser, Beit Jala est une commune plutôt « riche », proche de Jérusalem. Bien qu'en 2000, elle ait subi une l'incursion de Tsahal, pendant l'Intifada, qui a laissé des traces dans les têtes et
sur le terrain.
Ma visite fut brève mais chaleureuse. Monsieur Raji ZEIDAN, maire de Beit Jala, me reçoit le vendredi 6 mars à 8h30.
Il rappelle sa satisfaction de la relation tripartite qui s’engage entre Aubervilliers, Beit Jala et Iéna, ainsi que son désir de venir nous voir en France.
Je lui fait part à mon tour de notre visite à Gaza et lui demande s’il s’y était rendait récemment. Il avait l’habitude de s’y rendre chaque mois jusqu’aux bombardements. C’est primordial, dans le
contexte actuel, de maintenir des liens entre élus de Cisjordanie et de Gaza.
Je fais part au maire de Beit Jala du projet de la Mairie d’Aubervilliers d’entreprendre des relations de « coopération » avec une ville israélienne. Il m’avertit d’emblée de la rapidité de notre
projet. Le moment pour lui n’est pas du tout propice en raison du conflit avec Israël, ainsi que du manque de lisibilité entre les diverses forces politiques palestiniennes (Hamas, Fatah, etc.). A
cela s’ajoutent l’approche des élections en Palestine et les récentes élections
israéliennes. De plus, il doit y avoir cette année des élections municipales dans les territoires palestiniens. Légèrement agacé, monsieur Zeidan nous conseille d’attendre la fin de l’année
2009.
Je lui fais part de notre rencontre avec Joséphine Lama, consultante, qui travaille avec l’université « Al Quds Open University ». Cette université se trouve à Beit Jala et à Bethléem.
Je lui expose le projet de campus universitaire à Aubervilliers qui pourrait ouvrir de nouvelles perspectives d’échanges. Dans un premier temps, des échanges avec nos lycées ou sous forme d’accueil
de stagiaires pourraient facilement être mis en place.
Après nous avoir présenté les locaux de la mairie, rappelé les différentes visites d’élus d’Aubervilliers, évoqué sa rencontre avec le Pape Jean Paul II, Yasser Arafat, montré la galerie de
portraits des maires de Beit Jala de l’époque ottomane à aujourd’hui, monsieur Zeidan nous emmène, Véronique Le Bihan et moi, faire le tour de sa ville.
Beit Jala est proche de Bethléem et comporte beaucoup d’églises catholiques, un séminaire, deux mosquées, des villas de riches émigrés partis faire fortune en Amérique latine. Cela en fait un site
à l’attrait touristique indéniable. Piste à explorer !
La ville possède de nombreuses associations « society » qui oeuvrent dans différents domaines tant au niveau de l’éducation des femmes que de l’artisanat. L’artisanat est une source de revenus et
tourne autour de la broderie ou de la sculpture du bois. Nous passons devant un collège qui enseigne en Allemand.
Le maire nous montre les nombreux oliviers dont on tire la fameuse huile de Beit Jala. Puis il nous emmène sur le chantier de la future bibliothèque, plus grande que la précédente, qui surplombe un
jardin municipal où les habitants viennent pique-niquer, faire des barbecues,
(une idée à retenir, mettre des barbecues à disposition des habitants dans les parcs). Les jeux pour enfants sont maintenant non conformes et il serait intéressé pour que nous l'aidions à les
changer.
Cette atmosphère sereine et la courtoisie de monsieur Zeidan ne sauraient nous faire oublier les traces de l'occupation israélienne. Nous n’avons pas pu rater le pont qui passe au dessus de son
village et qui relie directement une colonie israélienne. Seuls les Israéliens sont autorisés à traverser ce pont qui leur offre un raccourci non négligeable.
Le « mur » qui surplombe le village de Beit Jala, un check point ! Il me montre un peu plus loin des immeubles C’est la colonie de Siloam, dans le prolongement de Jérusalem. Il m'explique que les
terrains appartenaient à la commune de Beit-Jala et ont été annexés, sans autre forme de procès.

Note optimiste : près de la mairie, un groupe de pacifistes
anti-colonialistes, composé de Palestiniens, d’Israéliens et d’Européens, attend pour partir planter des oliviers en signe de
manifestation contre l’érection du « mur de ségrégation » qui sépare Israël des territoires palestiniens.
Est ensuite venu le temps de la séparation afin de retourner à Jérusalem Est. Je prends quelques photos du mur détourné en certains endroits à des fins artistiques (comme jadis le
mur de Berlin tiens ?!) et discute avec mon chauffeur de taxi, Georges Hanna, né dans la région. Il vit à Jérusalem Est et possède une résidence secondaire à Beit Jala. Pour lui, Beit
Jala est à part en Cisjordanie. Il y règne un climat paisible de tolérance. Il est vrai que j'y serais bien rester quelques jours de plus ! Beaucoup de projets en perspectives !
Nous retrouvons le groupe au Consulat de France à Jérusalem.
Visite au SCAC, quartier de villégiature, très agréable.
Nous sommes reçus par une dame4 dont le nom m’échappe, mais qui a eu de nombreux postes au Moyen Orient. Nous nous tassons dans une ambiance studieuse à l’intérieur d’une petite pièce
contrastant avec l'élégance grandiose du bâtiment.
Monsieur Josselin rapporte l'objet de notre mission à Gaza. La SCAC nous informe alors que la France serait candidate pour la reconstruction de l'hôpital AL-QUDS (2 milliards de dollars !), ce qui
permettrait la reconstruction d'un bloc technique et l'achat d'équipements radiologiques. ACTED demande également de l'aide.
Monsieur JOSSELIN fait part de la réflexion sur un programme porté par Cités Unies France pour la bande Gaza. La dame du SCAC nous donne alors son analyse de la situation :
« La conférence de Charm el-Cheikh, a officiellement demandé à Israël de lever le blocus. En effet, en février 2009, il n’y avait que 58 camions à Kerem Shalom, tandis qu’en novembre 2008, il y en
avait 70. Depuis la fin de la guerre, il n'y a plus d'essence, seulement du fuel lourd pour la centrale électrique. Les ONG ont des difficultés pour rentrer à Gaza (excepté 4 Cette dame est Madame
Jacqueline COULON -LASCAUX – Attachée de Coopération sociale et
humanitaire Médecins sans frontière) Il y a des difficultés à faire rentrer l'aide humanitaire d'urgence et d’autres denrées telles que lentilles, pâtes, produits chlorés et papier (cela vient
confirmer les propos du directeur de l'UNWRA à Gaza). Les Palestiniens souffrent plus d'indigence que de pauvreté. Ils ont été mis sous pression pendant 3 semaines. Une forte pollution de l'eau est
également à constater en raison de l’éclatement des réseaux d'assainissement. Une équipe de l'Union Européenne a été envoyée à ce sujet. Les blessés hospitalisés restent en moyenne 48 h à
l’hôpital, allant ensuite au centre de santé pour les soins. La situation à Gaza risque de se détériorer encore plus. »
La représentante du SCAC pense qu'il faudrait augmenter la coopération des villes avec la bande de Gaza.
La région Provence Alpes Côtes d'Azur (PACA) a fourni en 2007 une aide d'urgence via le Programme Alimentaire Mondiale (PAM) pour les écoles de Khan Yunès. Le rééquipement de l'hôpital Al Quds,
pour améliorer la qualité des soins, est une priorité absolue. Des lits ont été envoyés par le Secours islamique français. La Croix Rouge Internationale (CICR) est la seule à faire passer le
matériel. S'il y avait des coopérations envisagées, le secteur privé aurait besoin d'un appui important : les entreprises ont besoin de liens techniques comme de formation, etc.
Les agences de Nations Unies ont bien du mal avec la crise économique à lever des fonds (pour l'instant, elles en sont à 20 % du montant des promesses). Ainsi les promesses financières grandioses
de Charm el-Cheikh risquent d’accoucher d’une souris. En matière de financement, il y a trois grands mécanismes :
· Celui de l'Union Européenne, PEGASE (la France n'y participe pas)
· Celui de la Banque Mondiale : « Trace Fund »
· Celui du compte du trésor palestinien (utilisé par la France). Ce fond sert à payer les salaires des fonctionnaires (50% des fonctionnaires palestiniens sont à Gaza)
La reconstruction se fera également sous forme de prêts et de dons.
Notre interlocutrice nous rappelle que lorsqu'il y a eu un gouvernement d'union nationale, la communauté internationale a boycotté les ministres du Hamas (ce n’est pas la première fois que
j’entends cela). Elle constate une évolution dans le discours d'Hillary Clinton sur le Hamas.
Par ailleurs, les Conseils Généraux du 93 et du 94 ont travaillé avec des ONG et avaient des contacts avec le Hamas.
La représentante du SCAC constate que le gouvernement de Sallem Fayyad n'exerce pas de contrôle sur la Bande de Gaza. Déjà avant la guerre, le gouvernement de Ramallah (Autorité Palestinienne) a
voulu « pourrir » un peu plus la situation, ce qui explique ce contexte de « coup d'état ». En effet, en 2008, il y a eu une grève des fonctionnaires à Gaza qui ont ensuite été remplacés par des
gens proches du Hamas, d'où le deuxième conseil municipal nommé par
le Hamas. Elle nous cite également l'exemple de l'approvisionnement des médicaments : le Gouvernement de Ramallah a demandé que tout passe par Ramallah, du coup cela a fragilisé les infrastructures
médicales de Jérusalem Est qui ne pouvaient alors plus s'approvisionner qu'auprès des Israéliens. De même, l'Autorité Palestinienne a réprimé les manifestations contre Israël en Cisjordanie.
Raji Sourani et Moustapha Bargouti analysent la situation et prévoient la victoire du Hamas aux prochaines élections. Sur les 1300 morts de l'incursion israélienne à Gaza, seuls 40 appartenaient au
Hamas. Ce dernier s’est montré de nouveau après la guerre pour contrôler la population et l'aide humanitaire. Selon notre interlocutrice, le Hamas n'est pas populaire dans la bande de Gaza, mais il
n 'y a aucune solution de rechange.
L'Autorité Palestinienne a montré son incapacité à redistribuer l'argent : par exemple 35% du budget de l'aide sont passés dans la création d'une police ! Même si par ailleurs le rétablissement de
l'ordre et de la sécurité était exigé.
Les Palestiniens n'ont plus beaucoup de repères, ce qui est du pain béni pour le Hamas. La représentante du SCAC pense qu'il n'y aura pas deux états, mais quatre! Gaza, Jérusalem Est,
La Cisjordanie et Israël. Quel programme !
Actuellement, Tel Aviv s’emploie à détruire les maisons de Jérusalem-Est afin d'y installer des colons. Notre interlocutrice nous explique que le territoire de la Palestine est découpé en Zones A,
B et C.
-Zone A : contrôlée par l'Autorité palestinienne le jour. La nuit, les forces israéliennes reprennent le contrôle, d'où le laxisme par rapport aux colons qui en profite pour s'installer.
-Zone B : routes.
-Zone C : zones militaires et parcs nationaux.
J'aimerais en savoir plus !
80% du territoire de la Cisjordanie est occupé par les zones B et C. Il n'y a donc pas de territoire palestinien. Cette situation est comparable à celle de « Bantoustans » qui isolent les villages
palestiniens les uns des autres. Actuellement, le nombre de nouveaux immigrants israéliens diminue.
Il y a eu une importante vague de Russes qui ont boosté l'économie israélienne, notamment dans le développement des nanotechnologies, puis une vague de migration éthiopienne, en difficulté
d'intégration. Notre interlocutrice nous parle du phénomène de ces français du week-end, qui travaillent la semaine en Israël et rentrent en France chaque fin de semaine. De même qu’il y a des
Français dans les colonies qui viennent du 93 et du 94, très actifs à Hébron.
Pour l'instant la communauté internationale n'a pas de « lisibilité » (elle cite Michel WARCHAWSKI, opposant israélien de longue date à la politique de colonisation deTel Aviv).
Nous avons du mal à prendre congé tant cette dame a encore beaucoup d'informations à nous donner. Elle a essayé à grand trait de nous brosser un portrait de la complexité de la situation.
Nous devons prendre congé afin d'avoir le temps de rendre visite au Consul de France
Visite du Consul Général de France à Jérusalem
La demeure est digne d'un consul : la vue de la terrasse donne sur le dôme de la mosquée, etc.
Madame « la SCAC » est ici ainsi que le jeune vice consul qui nous a accompagné à Gaza.
Monsieur Josselin présente notre mission : ils se sont déjà vus lors de notre premier passage à Ramallah. N'oublions pas que nous voyageons avec un ancien ministre chargé de la coopération
décentralisée ! Le consul rappelle l'importance de la coopération décentralisée pour la coopération internationale. (Il faudra le rappeler à notre maire !) Il est plus important selon lui de
coopérer directement avec les villes que l'Autorité Palestinienne. 2/3 des délégations culturelles ne peuvent plus entrer au CCF à Gaza. Des camions de pâtes ont été bloqués par les Israéliens («
politique des Macaronis »).
Charm el-Cheikh prévoit 4,5 milliards de dollars pour la reconstruction ? Alors que le minimum ne rentre pas ? Hillary Clinton est intervenue contre les destructions des maisons palestiniennes. Il
y a eu une véritable mobilisation internationale contre la destruction et l'expulsion des maisons de Jérusalem Est. Mais les colons font sans cesse pression sur le gouvernement d'Israël.
Le Fatah est totalement absent du conflit à Gaza. N’oublions pas que les forces de police palestiniennes ont réprimé les manifestations anti-israéliennes à Ramallah. Mahmoud Abbas ne s’est pas
rendu en Cisjordanie depuis le début de l'année. Les élections palestiniennes sont prévues pour le 10 janvier 2010. Le gouvernement d'union est un des principaux bailleurs de fonds pour la
reconstruction. Mais pour reconstruire avec qui ?
Autre question : est-ce que le Hamas est sorti gagnant de l’agression israélienne? Pendant l'incursion, il s'est protégé dans la population. Il y a encore des tirs de roquettes sur Israël. Les
tunnels sont d’ores et déjà reconstruits. Il y a un mouvement dans la région en faveur du Hamas, mais, parallèlement, celui-ci a perdu de la popularité à Gaza, compensée néanmoins par une
augmentation de son aura en Cisjordanie.
Pourquoi le Hamas aurait-il intérêt à rentrer dans un gouvernement d'union ? Sa reconnaissance internationale serait plus rapide! Il négocierait l’ouverture du point de passage de Rafah pour
l'Égypte. Le Hamas gagnerait également de l’audience en Cisjordanie où il est encore faible.
En ce qui concerne la réforme de l'OLP, est-ce que le Hamas va en faire partie ?
-C'est une période de transition du côté israélien : le maire de Jérusalem est un jeune technocrate. Nous avons désormais le gouvernement le plus à droite de l'histoire d'Israël.
Mme Clinton a une attitude plutôt molle, mais à priori sa présence a limité les démolitions de maisons à Jérusalem Est. Bruxelles suspend sa politique de rehaussement des relations avec Israël.
Sur les rétorsions économiques contre Israël ?
-Il y a visiblement encore du chemin à faire. Par exemple, le tramway de Jérusalem est soutenu par la gauche et la droite françaises parce que Véolia et Alsthom risquent sinon le dépôt de bilan
!
Le sentiment des Juifs français par rapport à Israël est par ailleurs très fort. En raison de l’histoire de l’antisémitisme en France, beaucoup sont exigeants et très attachés à l'État
israélien.
Pourquoi cette impunité d'Israël ?
-Le Consul envoie 1200 télégrammes diplomatiques par an, ce qui paraît non négligeable !
Quel témoignage donner à notre retour ?
-Le peuple palestinien n'est pas abandonné. Sa résilience est assez admirable. Il est toujours debout. Il est par ailleurs primordial de faire venir de jeunes artistes palestiniens, pour que cette
culture survive. Il est important de ne pas dissocier la question de Gaza de celle de la Cisjordanie si l’on souhaite un seul vrai État palestinien.
Fin de l’entretien.

Comment conclure après tout cela ? Le conflit israélo-palestinien s’accompagne de tant de
passions, de crispations, de sous-entendus des uns et des autres qu’il semble plus inextricable que jamais. Pour l'instant, il y a un réel manque de lisibilité et de possibilité de prospective sur
la situation.
Nous consacrons le temps qu’il nous reste à flâner dans Jérusalem. Nous commençons par «le mur des lamentations » of course. Il faut passer par des sas de contrôle électronique pour accéder à la
place. C'est étonnant de voir toute cette technologie mélangée aux tenues traditionnelles des religieux. Comme ils disent dans les guides, « entre tradition et
modernité… ». Même les jeunes soldats peuvent se rendre en arme au lieu de prières.
Charmant !
Nous restons longtemps à contempler la ferveur des croyants. Trop tard pour accéder à la place de la mosquée. Nous nous rendons alors au Saint Sépulcre.
Mes amis m'avaient prévenue : « tu seras impressionnée par le lieu symboliquement fort ».
Malheureusement, je me suis éloignée de tout ça. En revanche, j'ai été impressionnée par le cosmopolitisme de l'endroit et j'ai rêvé à chaque destin singulier qui a poussé ces personnes à venir en
Israël.
Retour pour le dernier repas dans Jérusalem.
7 mars, départ de Jérusalem
Tôt le matin, nous repartons pour la Jordanie. En effet, le pont d'Allenby, point de passage frontalier, ferme à 12 h. Ici on ne connaît pas la continuité du service public !
Tout se passe bien ! Nous voilà maintenant en Jordanie et nous retrouvons notre ami A.S
Nous décidons de passer la journée sur la Mer Morte avant de prendre notre avion pour Paris.
Pour ceux qui ne connaissent pas, en sortant du bain, on est tout salé mais aussi tout huileux !
L'atmosphère est détendue, il y a de la musique et les hommes dansent, me semble t-il le « Dabka ». Seuls les hommes dansent ! C'est moins bien du côté des femmes, elles ne peuvent pas se baigner
en maillot de bains mais
au mieux avec des tee-shirts et un leggings ou un short (c'est ce que vivaient nos arrières grand-mères au 19ème siècle), au pire elles restent au bord avec leurs vêtements traditionnels.
En tout cas il n'est pas interdit aux étrangères de porter un maillot de bain.
Dernière visite de Amman pour admirer la ville à la tombée de la nuit.
Au revoir la Palestine et à bientôt!

Comment, en tant qu'élue du parti Vert, j'analyse la situation ?
Avant mon départ, j'ai lu régulièrement les articles de Michel WARCHAWSKI dans Siné Hebdo. J'avais besoin de l'éclairage d'une personne vivant en Israël et ayant un discours quelque peu en rupture
avec l’opinion commune.
J'ai pu constaté sur le terrain, moi « néophyte » des conflits internationaux, malgré tout un peu au courant, ce que j’avais appréhendé dans mes lectures. (Je précise également que depuis des
années, j'assume une permanence juridique où je reçois des sans papiers venus du monde entier. Certains recherchent de quoi nourrir leur famille, d'autres fuient des conflits locaux ou
internationaux, tous recherchent une certaine forme de liberté.)
Ce que j'ai pu voir de la situation sur le terrain ressemble étrangement à une politique de colonisation rondement menée par l'État israélien à l'égard des Palestiniens. Et en matière de
colonisation, en France, on s'y connaît un peu. Je souligne cela parce que, indépendamment de l'occupation du territoire par les colons au mépris des accords internationaux, la situation juridique
des Palestiniens rappelle ce que l'administration française a pu mettre en place en Algérie et certainement d’ailleurs ce que tous les gouvernements du monde mettent en place dans des cas
similaires.
Il y a des gens à la citoyenneté pleine et entière, les Israéliens juifs, et ceux qui ont citoyenneté de seconde zone, avec beaucoup de statuts différents à ce que j'ai pu voir. En effet, certains
Palestiniens ont une carte d'identité israélienne, mais dès qu'ils quittent l'état israélien pour voyager, ils ont un passeport jordanien ou un laisser passer. D'autres vivent
dans des camps de réfugiés en Cisjordanie ou à Gaza.
Les Palestiniens n'ont pas le droit de se déplacer où ils le souhaitent. S'ils se déplacent, ils perdent leur ID israélienne! Vu de l'extérieur, c'est kafkaïen ! Comment les Palestiniens
peuvent-ils supporter d'être traités comme cela, eux dont la terre est devenue le refuge des millions de persécutés de la Shoah ?!
Pendant la période de colonisation en Algérie, il y avait cette forme de double citoyenneté :
les Français et les citoyens de seconde zone, musulmans.
On entend partout : « Il faut deux états : un palestinien et un autre Israélien ». L'état palestinien serait forcement coupé puisque la bande de Gaza et la Cisjordanie ne se touchent pas.
D'autres pessimistes disent que l’on voit se dessiner quatre états : Gaza, la Cisjordanie, Jérusalem-Est et Israël.
Des Palestiniens parlent aussi d'un seul état binational, sans aller vers la laïcité.
Et puis de petites voix avancent l'argument qu'un seul état laïc serait la solution. Solution la moins raciste. Pour ma part, c'est celle-ci que je souhaite défendre.
Pendant ce court séjour, j'ai apprécié que les fonctionnaires internationaux et diplomates français n'usent pas de la langue de bois. Au contraire, ils ont dénoncé la stigmatisation du Hamas,
visant à le faire passer pour un groupe de dangereux terroristes et ils ont dénoncé la communauté internationale qui laisse Israël depuis sa création violer impunément le droit international.
Monsieur JOSSELIN parlait souvent à l'égard de la communauté internationale « d'indulgence coupable ». Effectivement, il était certainement plus facile aux puissances occidentales après la Seconde
Guerre Mondiale de régler la question de l'antisémitisme par la création d'un état réservé aux Juifs plutôt que de chercher chez soi la raison de cet antisémitisme pour les considérer enfin comme
des citoyens à part entière.
Je souhaiterais qu'on cesse de mettre la question de la religion en avant, parler de Juifs et de Musulmans, mais qu'on parle de « citoyens », d'égalité des droits. L’instrumentalisation politique
de la religion est le ferment de la division des peuples, comme le nationalisme.
J'ai lu peu de temps avant mon départ que les mariages laïcs étaient interdits en Israël.Ce n’est pas un cas isolé. Il en est de même au Liban et je pense dans la majeure partie du Moyen Orient.
Nous ne sommes pas encore près d’arriver à une vraie séparation du religieux et du politique.
Mais les Verts s'intéressent tout de même également aux questions plus environnementales.
Et bien oui, indépendamment de la question du non respect des droits humains, se posent effectivement des questions environnementales.
A Gaza, lorsque l’on visite des endroits bombardés au phosphore, je me pose la question bien entendu des effets sanitaires effroyables sur les civils, mais également la question de la dépollution
des sols, celle des déchets, etc.
La question de l'eau et de l'assainissement a été prégnante dans nos rencontres. Les bombardements ont détruit en partie le réseau d'assainissement, provoquant des pollutions de la nappe
phréatique, qui, par ailleurs, est fragile en raison de la présence de la mer et des risques de salinité. Ce qui peut la rendre impropre à la consommation.
Plus spécifiquement, sur la question de la mer à Gaza, la zone de pêche étant très limitée, les fonds marins ont été ratissés et il n’y a quasiment plus de poissons, sans compter que les pêcheurs
sont régulièrement victimes de balles israéliennes.
Pendant notre visite à l'hôpital du Croissant Rouge à Gaza City, dévasté, j'ai ramassé un dépliant écrit en arabe mais illustré qui m'a permis de comprendre qu'il mettait en garde les enfants de
jouer dans des décombres ou des gravats au risque de sauter sur une roquette, une bombe non explosée. C'est aussi une forme de pollution bien présente pendant les conflits armés.
Pour conclure, ce voyage m’a profondément bouleversée et révoltée quant à la situation dans les territoires palestiniens, m’offrant des images réelles d’une situation qui ne me révoltait
jusqu’alors qu’instinctivement, par presse ou livres interposés.
Cette expérience m’a secoué la conscience et ouvert les yeux sur une situation coloniale insupportable qui n’est malheureusement pas un exemple unique sur notre petite planète.
Ainsi je souhaite conclure par une citation de l’immense poète palestinien mahmoud Darwish :
« Celui qui m'a changé en exilé m'a changé en bombe... Palestine est devenue mille corps mouvants sillonnant les rues du monde, chantant le chant de la mort, car le nouveau Christ, descendu de
sa croix, porta bâton et sortit de Palestine. »
Mahmoud Darwish
Poèmes palestiniens (1970)
Christine Ratzel, mars 2009